Cher L*E*M*, vous avez écrit vos oeuvres sans vous soucier de qui les lira, nous dites-vous. Cette déclaration vous honore et honore vos oeuvres, mais permettez-moi de ne pouvoir vous suivre sur cette voie. Permettez-moi de ne pas croire cela possible, d’écrire sans se soucier de qui lira. Peut-être, vous, ne vous en êtes pas soucié consciemment, mais l’acte d’écrire s’est soucié pour vous du lecteur, dans tous les choix artistiques que vous avez dû opérer. Et d’abord, le premier d’entre eux : celui de la langue dans laquelle vous écrivez. Vous avez choisi la langue de la tribu, et déjà c’est faire un choix de communication, c’est sélectionner qui peut vous lire. Ensuite les formes. On n’écrit pas sans guide, hors de tout genre, de toute structure établie. Par l’organisation d’un dialogue, par la disposition des mots sur la page, par la syntaxe, vous vous placez dans le format d’un acte de communication possible, vous écrivez sous le regard virtuel d’un récepteur doté de certaines capacités de déchiffrement. Pour échapper à toute forme préétablie, non codifiée dans le cadre de la communication, non inscrite dans le grand catalogue et l’histoire de notre Culture, non frayée par des milliers ou des millions d’écrivants/lisants, échappant à la relation écrivain-lecteur, il faudrait une production aléatoire telle que pourrait la réaliser un ordinateur.
Pour reprendre un concept, si je me souviens bien, proposé par Umberto Eco (ou Hans Jauss, sous le terme d’horizon d’attente), tout acte d’écriture détermine son « lecteur idéal », production du texte… comme vous même, l’écrivain ! Lecteur et écrivain, sont sécrétés par le texte… Ils en sont les premiers personnages, qui ne sauraient manquer.
Avec mes fraternelles amitiés de personnage,
YG
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