Je verre brisé du songe.
Au réveil, le dormeur se fragmente sur les arêtes irréconciliables de son rêve. Alpes, aiguilles ensanglantées, il ne sait plus où il est, et lutte pour se résorber dans l’oeil bigle du moi. On se hâterait d’oublier tout ça, à quoi on préfère une belle histoire bien ficelée.
La bluette oraculaire bien ficelée, les romantiques l’ont reçue en grande pompe, en fanfare, comme aux portes de nacre de l’aéroport, sous le panneau « arrivées ». Ils ne franchissaient pas les limites de l’incohérent.
Les surréalistes, quand bien même étonnés des conflagrations inconscientes, continuaient à traiter celles-ci en objets exotiques, que l’on disséquerait sur la table de travail du sujet.
Proust, finalement, lorsqu’il ouvre la Recherche par des considérations sur le sommeil et les songes, est peut-être le plus juste, dans l’évocation de la perte du sentiment d’identité, la confusion du sujet avec les objets de son rêve : « il me semblait que j’étais moi-même ce dont parlait l’ouvrage : une église, un quatuor, la rivalité de François Ier et de Charles-Quint ». Encore Proust ne peut-il se détacher de l’idée que le dormeur croit être quelque chose, même si ce quelque chose n’est pas ce qu’il lui paraît être d’habitude.
Y a-t-il quelque sens à tenter d’imaginer ce qu’il advient du sujet pensant, et de tous ses habituels oripeaux identitaires, au profond de son sommeil, et donc de son absence ? L’état liminaire du rêve nous paraît être ce seuil d’où l’on apercevrait le côté de l’inexistence, le côté de chez soi-non. Là -bas se dit un dit indicible, bizarre.
Une poésie jaillit de ces fissures illogiques de la vie et de la langue.
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Oui je crois que l’icst est psychotique. Belle réflexion.
Date: Fri, 14 Jun 2013 22:51:18 +0000 To: dezart@hotmail.fr
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