Merveille ! La déclive clarté discrimine, vaporeuse, de l’ombrescent feuillage tel fruit, telle feuille en lesquels affleure le secret feu de l’automne. Les branches livrent leurs mains sur le pied frais du ciel. De grâce, ne me chantez rien, j’écoute s’évader le jour.
C’est le Camp du Drap d’Or dont se retire le soleil octobrite qui caracolait entre les charretées de betteraves. La soie cendreuse du ciel flotte sur des bataillons de rouvres roux. Voici les baies des haies confites en une odeur d’humus.
Et tu découvres sur le déroulement du livre quel regard tu jettes, obsédé de ce qui n’est pas toi, le miel fugace de la molène dans l’ombre, le bourdonnement de la dernière abeille.
Magnifique le lecteur qui de sa hauteur se penche, pampre de chlore en suspens sur la fontaine pour s’y voir frémir. Les astres en rang le long de son soir retiennent leur souffle. Le dieu déchiffre le témoin de son visage.
Les lisières ont bleui sur la senteur stagnante des herbes. Le pommier sur le cercle de ses sphères chues, tous les globes de rosée l’admirent. Ton visage s’est parfait à mesure que tu perdais ton âme.
Le rien a su qu’il n’était rien sauf le besoin de tout. Une attente qui n’est plus qu’elle-même, c’est l’heure, tu l’exauces. La femme qui fanait à mi-ombre est plus qu’à demi prête.
Où est alors le voile? La vigne vierge a rougi, pudeur dans le ciel soudain proche, autant l’automne venu qu’insolente crainte et la honte de sa joie.
Jean Grosjean, in Apocalypse, Poésie Gallimard
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