Le grain du rêve voltige ainsi que neige capricieuse de printemps : Seamus Heaney

Seamus HeaneyJ’apprenais la mort de Seamus Heaney alors que, coaché par mon ami le poète et dramaturge Richard Sanger, je consacrais une part de mon été à découvrir cette oeuvre couronnée d’un Nobel.
Il y faut franchir une barrière culturelle : la poésie anglo-saxonne est plus narrative, plus factuelle, et se perd moins dans les espaces que la nôtre ; et puis finalement, dépassement des barrières susdites ou universalité de certaines pièces, on y trouve quelques étoiles, des pépites qui dans le flot poétique reflètent le ciel auquel le Français prétend toujours s’adonner.
Ci-dessous, l’une de ces pépites dans sa version originale, puis une modeste traduction très littérale, qu’il me fera plaisir d’amender si l’on m’en fait des suggestions — en particulier, que peuvent être les « spring stations » des fantômes ?

« Voyelles labourées l’une dans l’autre : sol ouvert
Le plus doux février de vingt années:
Bandes de brumes sur les détroits, profond non-bruit
À la merci d’un tracteur hoquetant au loin.
Notre route s’évapore, les acres retournées respirent.
Alors la belle vie pourrait être de traverser un champ,
Et l’art symbolisé par une terre renouvelée sous le soc
Des charrues.  Ma prairie est labourée profondément
De vieux socs ont gorgé le sous-sol de chaque sens
Et je suis chatouillé d’un parfum
De la rose noire fondamentale.
Mais attends… De front avec la brume, vêtus de tabliers de semeuses,
Mes fantômes viennent arpenter leurs stations de printemps.
Le grain du rêve voltige comme la neige capricieuse de Pâques. »

« Vowels ploughed into other: opened ground
The mildest February for twenty years
Is mist bands over furrows, a deep no sound
Vulnerable to distant gargling tractors.
Our road is steaming, the turned-up acres breathe.
Now the good life could be to cross a field
And art a paradigm of earth new from the lathe
Of ploughs. My lea is deeply tilled.
Old ploughsocks gorge the subsoil of each sense
And I am quickened with a redolence
Of the fundamental dark unblown rose.
Wait then… Breasting the mist, in sowers’ aprons,
My ghosts come striding into their spring stations.
The dream grain whirls like freakish Eastern snows. »

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